La Charte des droits et libertés menacée

VICTORIA – Un nombre croissant de Canadiennes et de Canadiens ont désormais conscience des attaques répétées des conservateurs de Harper à l’encontre de la démocratie – prorogation du Parlement, outrage au Parlement, recours au bâillon pour limiter les débats, réunions des comités à huis clos –, mais peu de gens réalisent l’ampleur des brèches ouvertes dans la Charte canadienne des droits et libertés. Le 30e anniversaire est l’occasion d’alerter la population et de défendre la Charte.


« Lorsque la Charte des droits et libertés a été adoptée il y a trente ans, l’attitude à Ottawa était bien différente; le gouvernement était perçu comme le gardien de nos droits et libertés », a dit la chef du Parti vert du Canada et députée de Saanich—Gulf Islands, Elizabeth May.


« Depuis que les conservateurs de Harper ont pris les rênes du pays, le gouvernement est plus souvent perçu comme une menace à nos droits et libertés, et rien ne pourrait s’avérer plus dangereux pour la société et les valeurs canadiennes qu’une attaque perpétrée au nom de la démocratie. »


La Charte, établie en 1982 pour remplacer la Déclaration canadienne des droits, allait devenir la première partie de la Loi constitutionnelle de 1982. L’objectif était de rassembler les Canadiennes et les Canadiens autour d’un ensemble de droits – démocratie, égalité, langue et mobilité – et de libertés – conscience, religion, pensée, croyance, presse, rassemblement, etc.


Au cours des six dernières années, le Parti vert a noté l’érosion des droits garantis par la Charte dans plusieurs aspects de nos vies. En effet, un des premiers gestes posés par le gouvernement Harper fut d’annuler le Programme de contestation judiciaire, qui assurait un financement aux femmes et aux minorités pour contester les décisions judiciaires perçues comme contraires à la Charte.


« La fermeture de la Commission de réforme du droit du Canada et l’élimination du Programme de contestation judiciaire ont miné la capacité des Canadiennes et des Canadiens à faire respecter les droits qui leur sont garantis par la Charte », a dit May.


Le droit à l’égalité garanti aux femmes par la Charte a été systématiquement bafoué. Le parti vert du Canada a demandé à maintes reprises au gouvernement Harper d’annuler les importantes compressions budgétaires imposées à Condition féminine Canada et de rétablir le mot « égalité » dans son mandat.


Harper a éliminé le droit fondamental à l’équité salariale dans son budget de 2009, estimant notamment qu'il relevait carrément de l’abus. Il a fait la sourde oreille aux appels pour la création de stratégies pancanadiennes visant à fournir un service de garde d'enfants adéquat et à lutter contre la violence faite aux femmes.


Un élément important de la Charte est l’application de l’alinéa 11b) (le droit d’être jugé dans un délai raisonnable). Au cours des cinq dernières années, la durée des séjours en prison et au pénitencier s’est allongée en raison du manque de juges et de procureurs de la Couronne et d’un programme d’aide juridique inadéquat. Un récent projet de loi adopté par les conservateurs de Harper, le projet de loi C‑10, entraînera une hausse directe du nombre d’arrestations et d’incarcérations ainsi que de nouvelles violations des droits garantis par la Charte, surtout pour les membres les plus vulnérables de notre société.


Parallèlement, l’instauration de peines minimales obligatoires par le projet de loi C‑10 contrevient à l’article 12 de la Charte (protection contre les traitements ou peines cruels et inusités) et pourrait donner lieu à de nombreuses contestations judiciaires fondées sur la Charte.


En outre, la police n’est pratiquement jamais réprimandée lorsqu’elle enfreint la Charte. C’est inacceptable. Ce type de violation de nos droits devrait être jugé sévèrement lorsque le geste est intentionnel et un peu moins sévèrement lorsqu’il découle de la négligence ou de l’ignorance.


Le Parti vert n’a ménagé aucun effort pour attirer l’attention du public sur le recours aux certificats de sécurité par les conservateurs de Harper, qui autorisent l’arrestation de suspects sans accusations et sans procès et bloquent l’accès aux preuves pour des raisons de sécurité nationale, une pratique antidémocratique qui contrevient à la Charte. Les « procès secrets » sont une pente glissante.


Une bonne indication du pouvoir et de la nécessité de la Charte est le fait que la Cour suprême du Canada ait déjà affirmé que la peine de mort contreviendrait probablement à l’article 12 de la Charte. Grâce à la Charte, les conservateurs de Harper ont maintenu qu’ils ne souhaitaient pas rétablir la peine de mort.


Le système canadien d’immigration et de protection des réfugiés était jadis considéré comme un des meilleurs au monde, en partie parce qu’il tenait compte des droits garantis par la Charte. Le projet de loi C‑31 des conservateurs de Harper compromet sérieusement ces droits, plus particulièrement la disposition qui prévoit la détention arbitraire de tout réfugié âgé de 16 ans ou plus pour un minimum d’un an, sans possibilité de révision, à la discrétion du ministre. Cet aspect contrevient à l’article 7 (droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne), à l’article 9 (protection contre l’emprisonnement et la détention arbitraires) et à l’article 10 (droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat).


Cependant, il y a une lueur d’espoir. En effet, la Cour suprême du Canada a été unanime à conclure que les tentatives du gouvernement Harper de fermer InSite, un site d’injection supervisée situé à Vancouver, contrevenaient aux droits garantis par la Charte. Le Parti vert a toujours appuyé InSite en raison de son impact sur la réduction des risques pour la santé et la sécurité d’une population vulnérable. La Cour suprême a notamment renvoyé à l’article 7 et jugé que le refus du ministre d’accorder une exemption à InSite en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances était arbitraire et avait des effets exagérément disproportionnés. Le ministre a été contraint d’accorder cette exemption.


« La Charte des droits et libertés est et demeure un outil efficace pour assurer la préservation d’une société équitable et juste ainsi que la démocratie au Canada », a conclu May. « Mais dans les circonstances actuelles, nous devons redoubler d’efforts pour la protéger. »


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Renseignements :


Debra Eindiguer
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