Larry Miller, le registre des armes d'épaule et Adolf Hitler : les excuses manquées

Elizabeth May

Je n'en croyais pas mes yeux – et mes oreilles – lorsque le député de Bruce Grey—Owen Sound, le conservateur Larry Miller, s'est tiré indemne de pas un, mais bien deux débats dans lesquels il a comparé le gouvernement libéral précédent et le registre des armes d'épaule à Adolf Hitler. Ses « excuses » à la Chambre, qui l'ont vu appeler Hitler « cet homme terrible » étaient si alambiquées que Justin Trudeau a marmonné d'un ton sarcastique : « Je crois qu'il vient de s'excuser à Hitler pour avoir utilisé son nom. » À l'extérieur de la Chambre, lors d'une entrevue accordée à une station de radio locale, Miller a défendu sa remarque en disant qu'elle était valide d'un point de vue historique – ce qui est complètement faux, mais c'est une autre histoire.


Une des raisons pour lesquelles j'étais aussi choquée est que j'ai déjà fait les frais d'un matraquage en règle de la part de Stephen Harper, de John Baird et de leurs acolytes simplement pour avoir repris les commentaires de Georges Monbiot sur la réputation du Canada dans le monde quant à l'abdication de notre responsabilité à l'égard de la lutte contre la crise climatique.


C'était en 2007, et les conservateurs m'attaquaient sans relâche en Chambre où, en tant que chef de parti non élue, je n'avais bien entendu pas le droit de répliquer. Les paroles citées étaient complètement différentes. Contrairement à Miller, je n'avais pas mentionné Hitler et je n'avais comparé aucune entité politique canadienne à Hitler ou aux nazis.


J'avais simplement cité les paroles exactes de Monbiot : « Au regard de l'histoire, John Howard [alors premier ministre d'Australie], George Bush et Stephen Harper seront jugés encore plus sévèrement [pour leur inaction à l'égard de la crise climatique] que Neville Chamberlain. »


Pour cela, je me suis retrouvée sous un barrage de feu nourri par la colère des conservateurs, qui en voulaient surtout à Stéphane Dion pour avoir accepté un peu plus tôt de respecter la coutume parlementaire en s'abstenant de présenter un candidat dans ma circonscription.


Stephen Harper s'en est pris à Dion, le sommant de condamner mon attitude, affirmant qu'il était « tout à fait inacceptable de minimiser l'Holocauste et de faire des analogies avec le régime nazi. »


John Baird a rétorqué : « Quand elle a évoqué l'ère nazie pour se faire du capital politique, la chef du Parti vert a été insensible envers ceux qui ont connu cette sombre époque. [...] Ces propos sont profondément offensants. »


Tout cela était absurde. Ils ont retourné le tout sens dessus dessous pendant des semaines.


Nous voici, cinq ans plus tard, et le nom d'Adolf Hitler est invoqué deux fois en Chambre lors d'un discours préparé à l'avance. Le fait qu'il s'agisse d'un texte écrit et préparé à l'avance suggère qu'il a reçu le feu vert du cabinet du premier ministre.


Je ne retiendrai pas mon souffle en attendant que Harper ou Baird dénoncent un des leurs. Contrairement à moi, qui n'ai tracé aucun parallèle avec Hitler (et de là à dire que Monbiot ait voulu tracer un parallèle entre la menace nazie et la crise climatique, la marche est haute, mais il n'a certainement jamais suggéré de ressemblance entre les nazis et qui que ce soit d'autre), Miller a directement attaqué le gouvernement précédent et décrété qu'il était l'équivalent d'Adolf Hitler.


Le tumulte qui s'ensuivit fut de courte durée et étouffé par la même machine de propagande qui avait déchaîné les foudres contre moi en 2007.