Varsvovie COP19 : Est-ce la pire Conférence des Parties?

Elizabeth May

En fait, la question n’est peut-être pas tout à fait juste. La 15e session de la Conférence des Parties à Copenhague demeurera, espérons-le, ce qu’il y a de pire en terme d’efforts pour obtenir des mesures significatives pour éviter les désastres naturels. Mais entre le pire et le mieux, la Conférence des Parties de cette semaine pourrait égaler Copenhague.

COP19 Press Conference

Aujourd’hui, nous en sommes rendus à la deuxième et dernière journée de négociations. La plupart des points de négociations n’ont pas avancé. Le président de la Conférence des Parties, le ministre polonais de l’Environnement Marcin Korolec (qui préside les réunions et dirige le processus) a été viré hier par le premier ministre. Il demeure président de la Conférence des Parties jusqu’à la prochaine à Lima au Pérou en novembre prochain (COP20). Les rumeurs indiquent qu’il ne faisait pas partie de ceux au sein du gouvernement qui était en faveur d’une fracturation hydraulique massive et qu’il a été remplacé au cabinet par un ministre en accord avec cette position. Cela s’insère dans l’atmosphère lourde pro-charbon et industrielle établie par les hôtes de la Conférence des Parties.

Les choses sont dans un triste état, les délégués rapportant des incidents de négociation de mauvaise foi et des pays industrialisés exigeant de rouvrir des ententes déjà conclues. Le Canada (aux côtés des États-Unis et de la Nouvelle-Zélande) a soumis une proposition complètement nouvelle lors des négociations sur les finances à 7 h le matin, après une nuit de travail. La question des mauvaises procédures et des négociations de mauvaise foi est décuplée, manifestement, par les engagements à la baisse de Copenhague; ce leurre pour sauver la face que l’on appelle l’accord de Copenhague n’a même pas été respecté par les pays industrialisés. Les efforts pour acheter du temps pour polluer un peu plus en donnant de l’argent aux pays en développement – ce qu’ont fait Hillary Clinton et Barack Obama à Copenhague – s'étaient heurtés à l’opposition des pays pauvres. Je me souviens du chef de la délégation de Tuvalu, qui avait déclaré : « Nous ne vendrons pas nos enfants pour vos 30 pièces de monnaie. »

Admettons-le. Il s’agissait bien plus que de 30 pièces de monnaie; c’était en fait 100 milliards $.

C’était un engagement pour un nouveau système de financement sur le climat pour aider les pays en développement à réduire leurs émissions et à s’adapter aux conséquences de ce nouveau climat que nous ne pouvons plus éviter. On devait commencer rapidement avec 10 milliards $ et augmenter la somme à 100 milliards $ par année d’ici 2020. Tous les autres pays industrialisés ont signé cette entente, notamment le Canada. Les Nations Unies ont répondu en déterminant les modalités pour recueillir et distribuer les fonds. Le Fonds vert pour le réchauffement climatique est dûment constitué. Mais il est vide. Les contributions initiales ont été dépensées rapidement. Le fonds est maintenant vide.

L’offre (le pot-de-vin) semblait, j’en suis sûre, une somme d’argent qui augmenterait régulièrement jusqu’à atteindre 100 milliards $ par année. Hillary Clinton avait été prudente en disant en 2009 au Danemark que l’argent serait récolté du public et du secteur privé, que l’argent ne serait pas versé entièrement par les gouvernements. Mais encore… il est difficile de croire les affirmations lancées ici à Varsovie de pays riches comme les États-Unis et le Canada : n’attendez pas d’argent dans ce fonds jusqu’en 2020. Les pays rétorquent à cela : « Vous vous attendez qu’on croie que soudainement, il y aura 100 milliards $ dans ce fonds en 2020, et pas un sou en 2019? »

Cette question, appelée dans le jargon de la Conférence la question des finances, est l’un des principaux points de friction de cette Conférence des Parties. Les représentants d’ONG portent maintenant des macarons arborant cette question : Où est le financement? En fait, le macaron affiche l’abréviation de la question en anglais : WTF? (Where’s the Financing?)

L’embâcle ici, c’est le sentiment que les pays riches ne font que jouer pour éviter de s’engager sur les questions du financement, du fonds pour pertes et dommages ou, plus important encore, de la réduction plus nette d’émissions, tout cela ayant mené au départ inattendu et historique de participants, hier. Même si certains rapportent que les pays en développement ont claqué la porte, cela n’est pas le cas. Ce sont plutôt des centaines de représentants d’ONG, de la société civile, de groupes environnementaux, de syndicats et d’autochtones qui ont tourné les talons. Parmi ceux qui ont quitté cette Conférence précipitamment, on compte le Fonds mondial pour la nature, les Amis de la terre, Oxfam, Greenpeace, l’organisme 350.org et de nombreux autres.

Durant les séances plénières d’inventaire plus tard cette journée-là, de nombreuses délégations, dont la Chine, ont remercié la société civile pour ce genre d’actions. (Il est fascinant de voir un pays qui rend illégal ce genre de manifestations les apprécier, ici, à la Conférence des Parties).

Les négociations se sont poursuivies jusqu’aux petites heures du matin, sur plusieurs points de discussion. La réunion du Groupe de travail spécial sur la plate-forme de Durban pour une action renforcée s’est terminée tôt, à environ 21 h, mais celle sur les finances s’est poursuivie jusqu’au matin.

Selon toute vraisemblance, la journée de demain (aujourd’hui) vendredi, sera très longue.